(pologne) Je suis née à Varsovie en Pologne. Mon père est purement polonais, et ma mère était une étudiante française en Erasmus. Je n'étais pas vraiment prévue au programme et pourtant, mes parents ont tout fait pour me rendre heureuse. Ma mère a abandonné sa famille pour m'élever dans le pays de mon père, et mon père se tuait à la tâche afin de me rendre heureuse également. Si seulement. J'ai eu une enfance relativement heureuse. Une mère qui s'occupait de moi à merveille, un père sans doute un peu trop absent mais qui était toujours là pour sa fille. J'apprenais le polonais à la maison, mais aussi le français avec ma mère, c'était important pour elle. Ils ont décidé de m'inscrire dans une école internationale à mes six ans afin que j'apprenne également la langue de Shakespeare. Autant dire que niveau langage, j'ai toujours eu des facilités ce qui me permet aujourd'hui d'affirmer que je suis trilingue.
(désastre) J'avais douze ans. Il faisait nuit, et il avait neigé ce soir là. Ce soir où papa ne devait pas être à la maison. Maman était souriante, je n'ai jamais su pourquoi, et je ne le saurais jamais. Quand nous avons entendu la porte de l'entrée s'ouvrir, je me souviendrais toujours du regard de ma mère. La peur. Puis le hurlement. Je ne sais pas vraiment ce qu'il s'est passé, mais papa est apparu dans l'angle de la porte menant au salon avec un drôle d'instrument. Maman était par terre, et elle m'a dit qu'elle m'aimait. Ce sont les derniers mots que j'ai entendu de sa part. C'est la dernière fois que j'ai vu mon père. J'ai perdu mes deux parents ce soir là.
(la france) Les foyers sociaux polonais ont été un quotidien pendant un mois avant que l'Etat réussisse enfin à recontacter ma famille maternelle. Je ne les connaissais pas vraiment, ma mère avait coupé tout contact avec sa famille quelques années avant ma naissance. Mon père n'avait pas de famille, et maintenant qu'il était en prison, plus personne ne pouvait s'occuper de moi. C'est ainsi que je me suis envolée pour la France, quittant mon pays natal. Les débuts n'ont pas été faciles. J'ai eu le mal du pays pendant plusieurs mois, peut-être même plusieurs années en réalité. J'ai atterri dans une famille que je ne connaissais pas, une tante, un oncle et une cousine plus jeune que moi, Charlie. Moi qui voulait une petite soeur, j'ai été servi. La langue française ne m'était pas inconnue grâce à ma mère et pourtant, me retrouver scolarisée dans une école publique ont rendu les débuts relativement difficiles.
(diplôme) J'ai eu mon bac scientifique avec mention très bien à l'âge de dix-neuf ans, une année de retard à cause de mon passé difficile. J'ai voulu m'engager dans des études de médecine, et j'ai réussi les deux premières années avec brio. Je voulais être médecin légiste, je n'ai jamais vraiment su pourquoi. Simplement aider les personnes.
(traumatisme) J'avais vingt-quatre ans, et la voiture dans laquelle je me trouvais a été prise en poursuite par un homme fou furieux. Nous avons fini, moi et mon petit ami de l'époque dans un arbre, et il a perdu la vie ce soir là. Un traumatisme dont je souffre encore aujourd'hui.
(reconversion) Après mon accident, le retour à la réalité a été relativement difficile. J'ai eu besoin d'une infirmière à la maison pendant plusieurs mois pour des perfusions de médicament suite aux douleurs, et je suis tombée amoureuse de son métier. C'est ainsi que j'ai décidé d'abandonner mes études de médecine afin de passer le concours d'infirmière, que j'ai eu, haut la main bien évidemment.
(stan) Après la perte de mon petit ami, j'ai mis plusieurs années avant de réussir à me remettre avec un homme. J'ai rencontré Stan a l'école d'infirmière, enfin, il était le colocataire d'une amie étudiante. Il est américain, et je suis tombée complètement folle de lui. Nous nous sommes rapidement mis ensembles, et je me suis envolée avec lui après mon diplôme d'infirmière pour le Sud Ouest des USA. J'ai réussi à faire valoir mes équivalences là-bas et à obtenir un permis de travail.
(séparation) Il y a deux ans, nous avons été obligée de nous séparer avec Stan. Il devenait trop jaloux, et je n'ai pas supporté cette relation. Nous nous entendions bien certes, mais sa jalousie maladive a eu raison de notre couple et je l'ai quitté. Depuis, il continue de me courir régulièrement après, à m'attendre en bas de la porte de chez moi, à me surveiller pour me croiser volontairement dans les supermarchés. J'en ai marre, et j'ai peur que ça ne s'arrête jamais.
(les femmes) C'était il y a un an et demi que j'ai rencontré Sara. Sara, la douce Sara, avec ses cheveux blonds comme boucle d'or et son sourire angélique. Celle qui m'a montré qu'il était possible de ressentir des choses pour une femme. Celle qui m'a offert le plaisir pour la première fois. Depuis, je suis plutôt perdue quant à ma sexualité, je ne saurai pas dire si j'aime les femmes, si j'aime les hommes, si j'aime les deux. Je suis perdue.
(madame oakfield) Il y a un an, j'ai découvert une demande dans le journal. Une femme recherchait une infirmière à domicile pour sa mère cancéreuse en phase terminale. Je venais de perdre mon emploi après le décès d'une patiente, et je n'ai pas hésité une seconde. Le logement gratuit était un bonus, un espoir pour que Stan me laisse enfin tranquille. J'ai été prise, et le boulot a commencé. J'ai très vite compris que ça n'allait pas être simple. Morgan, la fille de la vieille dame n'est pas vraiment agréable, elle est distante, froide, et au bout d'un an, je ne saurais toujours pas dire qui elle est. Alors je la bouscule, ce sont des petits sourires à l'angle des portes, des mains glissés sur ses hanches quand nous nous croisons dans les couloirs. J'ai envie de comprendre pourquoi elle est ainsi avec moi, elle doit m'apprécier pour ne pas me virer et pourtant. Et puis soyons honnête, elle est quand même plutôt attirante...